Au 20e siècle, l’analyse fondamentale était la principale méthode utilisée par les professionnels de l’investissement pour déterminer la direction future des marchés. C’est d’ailleurs le principal type d’analyse que l’on trouve dans les ouvrages sur l’analyse boursière. L’analyse fondamentale est aussi enseignée dans les écoles de commerce. Cependant, cette approche d’analyse montre aujourd’hui ses limites avec des marchés qui réagissent plus rapidement à l’information.
Les limites de l’analyse fondamentale
Les marchés peuvent réagir rapidement avant la publication de données officielles.
Les marchés sont de nature anticipative, car les participants (les humains) ont tendance à anticiper sur les événements futurs. Si un événement positif ou négatif se produit dans une entreprise et qu’il a été anticipé par le marché, alors les fluctuations de prix de son action sont affectées par cette anticipation.
Si une entreprise annonce une fusion et que l’ensemble du marché s’attend à ce qu’elle soit positive, il ne sera pas utile dans ce cas d’attendre que les résultats se reflètent dans leurs résultats financiers.
Une telle situation s’est illustrée en 2019 dans le secteur aéronautique lorsque les actions d’Airbus se sont appréciées après que son grand rival Boeing ait déclaré qu’il suspendait en janvier 2020 la production de son avion de ligne 737 MAX. Les actions d’Airbus avaient augmenté de 1,6 % à l’ouverture des marchés européens, tandis que celles de Safran, fournisseur de Boeing, ont baissé de 2,1 %.
On voit là que l’analyse fondamentale serait en décalage avec la réaction des investisseurs qui agissent très rapidement aux informations qui leur parviennent.
Nécessité des connaissances avancées pour évaluer des institutions complexes
De nombreux groupes sont très grands. Ils possèdent de nombreuses filiales, entreprises communes et associés opérant dans des environnements économiques différents. L’analyse de ces entreprises peut s’avérer très longue et complexe, et l’investisseur doit avoir une bonne connaissance du secteur. Il faut bien comprendre les marchés financiers ou secteurs dans lesquels les filiales opèrent est nécessaire pour connaître la compétitivité de leurs produits et services.
La comptabilité de tels groupes est très complexe. Il y a donc plus de risques de faire d’éventuelles erreurs d’analyse.
La psychologie de marché fait réellement fluctuer les prix
Les investisseurs n’ont plus besoin de s’appuyer sur une analyse intensive et de développer une compréhension avancée des marchés. En fait, les chiffres et résultats financiers ne sont plus des facteurs très déterminants pour acheter ou non une action.
La plupart des investisseurs sont préoccupés de savoir si telle ou telle institution a un biais haussier ou baissier sur une action, mais aussi si les autres participants achètent ou liquident leurs positions. Cette approche d’investissement est plus psychologique que fondamentale.
Si les investisseurs sont enthousiastes par rapport à une valeur donnée, ils continuent à l’acheter, ce qui fait monter le prix de l’action en fonction de l’augmentation de la demande. Lorsqu’ils se désintéressent de la valeur, son prix chute avec la diminution de la demande. C’est ce qu’on appelle l’investissement momentum, qui est du simple suivi de tendance.
Si le concept de la psychologie des marchés qui fait bouger les prix peut être controversé du point de vue des analystes techniques et fondamentaux, il s’est avéré pertinent depuis plusieurs décennies. Les économistes qui étudient les bulles de marché se sont appuyés sur des facteurs psychologiques pour expliquer la hausse ou la baisse rapide des prix.
Ce phénomène est de plus en plus prononcé dans les marchés modernes avec l’accès désormais facile des investisseurs particuliers aux instruments financiers.
L’exemple le plus illustre récemment est la bulle du marché des cryptomonnaies en 2017, notamment le bitcoin. L’augmentation de sa valeur peut être entièrement attribuée à des facteurs psychologiques et non à des facteurs fondamentaux ou techniques.
Il n’était pas possible d’anticiper cette bulle par une analyse fondamentale. L’augmentation rapide de sa valeur est uniquement basée sur la conviction des investisseurs que le prix du bitcoin va augmenter. Des petits investisseurs particuliers aux institutions, les gens achetaient le bitcoin au fur et à mesure que sa valeur augmentait et que la cryptomonnaie était surmédiatisée.
Par conséquent, une ruée vers l’achat fait monter le prix, ce qui est simplement un investissement impulsif. Une fois que l’intérêt des investisseurs se tarit, ils se mettent à liquider leurs positions et le prix baisse.
L’approche contre-intuitive à avoir !
La psychologie de marché a bien une influence considérable sur le prix des instruments financiers. Mais elle peut aussi être utilisée pour anticiper les retournements de marché.
Historiquement, l’un des meilleurs moments pour acheter des actions est lorsque tous les autres participants vendent. À l’inverse, quand tout semble si bien se passer et qu’il y a de l’euphorie sur les marchés, c’est parfois le meilleur moment pour prendre ses bénéfices.
La crise de la COVID-19 l’a montré une fois de plus lorsque les marchés étaient au plus bas en mars 2020. À la mi-mars, bon nombre d’investisseurs étaient tentés de liquider leurs positions. Pourtant c’était une bonne occasion d’augmenter leur exposition aux marchés sachant que les valeurs étaient devenues dans l’ensemble moins chères. Depuis cette période, le CAC 40 a remonté de près de 40 % et le S&P 500 a marqué des records historiques.
Ainsi, les investisseurs avertis peuvent attendre les moments de peur ou d’euphorie pour anticiper un retournement des prix. Cet investissement au début ou à la fin de cycle offre en général d’excellents prix d’entrée, comparé à un placement en milieu de cycle.