Institution généralement peu connue des entrepreneurs, le fonds de dotation actionnaire peut se révéler comme une solution pertinente dans le cadre de la transmission d’une société. Revue des atouts de cet outil avec François Vignalou, Pascale Farey Da Rin, associés et César Engelmann, avocat, du cabinet Brunswick.
Le fonds de dotation actionnaire, un véhicule d’une souplesse remarquable
Créé en 2008, le fonds de dotation est une personne morale à but non lucratif. Elle reçoit et gère, en les capitalisant, des biens et droits de toute nature qui lui sont apportés à titre gratuit et irrévocable. Il utilise les revenus de la capitalisation de ces biens ou droits. Soit il réalise lui-même une œuvre ou une mission d’intérêt général. Soit il les redistribue pour assister une personne morale à but non lucratif dans l’accomplissement de ses œuvres et de ses missions d’intérêt général.
Il constitue un instrument original pour le mécénat, beaucoup plus souple que les fondations. Il bénéficie des mêmes avantages fiscaux, et permet au fondateur de conserver le contrôle de son action philanthropique.
Le fonds de dotation peut en effet être créé sans autorisation administrative préalable par une seule ou plusieurs personnes. Il devra être administré par au moins trois personnes, nommées librement par le ou les fondateurs.
Il facilite gouvernance et financement pour l’entrepreneur
Le fondateur dispose d’une réelle capacité d’innovation, d’organisation de sa gouvernance et de financement, dans le cadre des règles relatives à l’intérêt général et à la gestion désintéressée.
Le fonds de dotation actionnaire peut notamment prendre une participation au capital d’une entreprise. Ainsi il devient un fonds de dotation actionnaire. Un outil idéal pour gérer le capital philanthropique que peuvent vouloir créer des entrepreneurs au cours de la vie de leur société ou après la cession de cette dernière.
Un fonds de dotation actionnaire peut en premier lieu percevoir les dividendes versés par la société dont il possède les titres. Il pourra également céder lesdits titres à un tiers, à l’occasion de la transmission de l’entreprise. Cela permet à l’entrepreneur de réaliser pleinement son objectif philanthropique.
Le fonds de dotation concilie transmission d’entreprise, philanthropie et fiscalité avantageuse
Avant toute chose, le fonds de dotation actionnaire devra acquérir les titres de la société. Pour ce faire, la loi permet aux entrepreneurs de donner ou de léguer les titres de leur société au profit d’un fonds de dotation, qui bénéficie d’une exonération fiscale de principe sur ces dons ou legs.
Par ailleurs, les dons effectués au profit d’un fonds de dotation peuvent ouvrir droit, sous réserve du respect de certaines conditions, aux réductions d’impôt prévues en faveur du mécénat. C’est-à-dire à une réduction d’impôt de 60%, 66% ou 75% selon la qualité du donateur et l’activité du fonds.
Il convient ici de sécuriser la donation ou le legs des titres et de l’articuler le cas échéant avec d’autres dispositions existantes (Pacte Dutreil, donation-partage, etc.). Une fois que le fonds de dotation a acquis les titres, la cession de l’entreprise peut être envisagée à plus ou moins long terme.
Un fédérateur des membres d’une famille autour de valeurs philanthropiques
L’entrepreneur ou ses héritiers peuvent tout d’abord souhaiter affecter durablement les titres de l’entreprise au fonds de dotation. Il a vocation à demeurer pendant un certain temps associé de la société et ainsi à en percevoir les dividendes. Cela peut en outre permettre de fédérer les membres d’une famille autour de valeurs philanthropiques. Le cas échéant, cela préserve certains principes de gestion de l’entreprise, de poursuivre l’activité exercée ou encore d’éviter toute prise de contrôle hostile de leur entreprise.
Sur le plan fiscal, les dividendes perçus par le fonds de dotation sont exonérés d’impôt sur les sociétés. Sauf si ses statuts prévoient la possibilité de consommer sa dotation, c’est-à-dire les dons et legs qui lui sont consentis.
Mais l’entrepreneur ou ses héritiers peuvent également avoir un objectif de cession de l’entreprise à court terme. La cession de l’entreprise a alors en principe lieu peu de temps après le don ou le legs des titres sociaux au fonds de dotation. Cette stratégie permet notamment de purger les plus-values latentes sur les titres concernés.
Dans tous les cas, lorsque l’entrepreneur ou ses héritiers souhaitent procéder à la cession de l’entreprise, le fonds de dotation peut alors céder à un tiers sa participation. Ainsi il sécurise tout ou partie des opérations de transmission. Il bénéficie là encore d’un régime fiscal favorable, puisque l’éventuelle plus-value qui serait réalisée par le fonds de dotation n’est pas en principe soumise à l’impôt sur les sociétés, sous réserve de respecter certaines conditions.
Le fonds de dotation doit assurer une gestion passive de la société
En tout état de cause, le fonds de dotation actionnaire doit assurer une gestion passive de la société. Sans s’immiscer dans la gestion de l’entreprise, sous peine de voir son caractère d’intérêt général remis en cause, ce qui pourrait avoir des conséquences lourdes au plan fiscal. L’interposition d’une structure intermédiaire telle une holding peut être une solution efficace. Cela permet au fonds de jouer un rôle effectif dans l’évolution de l’entreprise sans contrevenir à sa finalité d’intérêt général.