Par Benoit Lemaitre, Associé chez In Extenso Ile-de-France
L’obligation de facturation électronique va s’imposer en France à partir de 2024 pour toutes les entreprises. Depuis le petit commerçant jusqu’à la grande entreprise, les modalités de gestion des ventes et des factures vont devoir changer. Les entreprises doivent donc se préparer dès à présent à cette transformation, notamment les TPE/PME.
Diminuer les charges et renforcer la compétitivité des entreprises
L’administration fiscale, dans un rapport publié en octobre 2020, a présenté les principaux apports de cette réforme, introduite par la loi de finances pour 2020. Il s’agit de lutter contre la fraude fiscale, et notamment la fraude à la TVA au moyen de recoupements automatisés. L’administration prévoit par ailleurs à terme de préremplir les déclarations de TVA selon le principe « Dites-le-nous-une-seule-fois ».
Il s’agit également de renforcer la compétitivité des entreprises grâce à la diminution de la charge administrative de création, d’envoi et de traitement des factures au format papier, toutes les études menées à ce sujet mettant en évidence des rapports de coût de 1 à 10. Cette automatisation va également permettre la connaissance au fil de l’eau de l’activité des entreprises et favorisera un pilotage plus fin des actions publiques.
Dès le 1er juillet 2024, toutes les entreprises devront être en mesure de recevoir des factures électroniques, et les grandes entreprises seront tenues de les émettre dans ce format. Puis, 1er janvier 2025, ce sera au tour des entreprises de taille intermédiaire (ETI). Enfin, au 1er janvier 2026, (TPE/PME) toutes les entreprises seront soumises à cette obligation.
Beaucoup de partenaires potentiels vont proposer leurs services aux entreprises en tant qu’Opérateur de Dématérialisation ou en tant que Plateforme de Dématérialisation Partenaire. Le conseil du cabinet d’expertise comptable de l’entreprise devrait être le choix privilégié : cette nouvelle gestion des factures de l’entreprise doit en effet être mise en œuvre en cohérence avec les travaux indispensables de fin d’exercice.
Nouvelle(s) plateforme(s) de gestion des factures et annuaire unique
Dans cette réforme, les entreprises n’auront plus la possibilité de transmettre directement des factures entre elles et devront forcément passer par une plateforme. Trois types d’acteurs sont en mesure de gérer des factures électroniques : le portail public de facturation (PPF), des plateformes de dématérialisation partenaires (PDP) et des opérateurs de dématérialisation (OD). Il faut noter que toutes les données remonteront obligatoirement au PPF en dernier lieu. Le portail public de facturation centralisera donc ces informations et les transmettra à l’administration fiscale. La DGFiP n’aura donc plus qu’un seul interlocuteur pour la réception des données, au lieu d’avoir à récupérer les informations directement auprès de chaque PDP.
Contrairement au schéma en « V » appliqué dans d’autres pays comme en Italie, le schéma en « Y » permet aux différentes plateformes de communiquer entre elles sans passer obligatoirement par le portail public de facturation.
L’annuaire Chorus Pro, géré par le PPF pour l’ensemble des acteurs, va enregistrer des informations pour chaque entité détentrice d’un SIREN et d’un ou plusieurs SIRET.
Il s’agira de déterminer, dans cet annuaire, par quelle(s) plateforme(s) l’entreprise et ses différents établissements souhaitent recevoir les factures électroniques déposées par leurs fournisseurs. Le rôle de cet annuaire sera crucial puisqu’il déterminera la gestion de la distribution des factures aux acheteurs.
Des TPE/ PME aux grands groupes : toutes les entreprises et types de factures sont concernés
Concrètement, toutes les entreprises, y compris celles qui ne sont pas assujetties à la TVA ou ne sont pas dans un secteur B2B doivent se poser la question de leur préparation à cette réforme. Même les entreprises qui n’établissent pas de factures peuvent entrer dans le champ de la réforme. Les commerçants assujettis à la TVA, par exemple, devront fournir leurs informations de caisse à l’administration fiscale par voie électronique. Une entreprise établie en France qui n’est pas elle-même tenue d’émettre des factures électroniques, devra de toute façon se préparer à en recevoir.
Pour les factures de vente, les factures manuelles ou manuscrites vont disparaitre et les factures établies dans des outils bureautiques ne seront pas compter comme des factures électroniques : elles devront disparaître également. Les logiciels de facturation, devenus indispensables, devront produire nativement des factures électroniques (au format Factur-X par exemple) et les transmettre automatiquement à la plateforme choisie par l’utilisateur. Enfin, les caisses enregistreuses devront aussi savoir produire et transmettre des factures électroniques lorsque le client est une entreprise. Elles devront également être en mesure de transmettre les Z quotidiens avec une périodicité variable vers une plateforme.
Concernant les factures d’achat, ces factures vont toutes être mises à disposition de l’entreprise sur une plateforme (Choix dans l’Annuaire Chorus Pro) et il sera nécessaire de choisir dans quelle interface l’entreprise veut les récupérer pour les consulter, les valider ou les refuser, et bien sûr pour les gérer comptablement. Les outils de gestion des factures de ventes (et les caisses enregistreuses pour les commerçants) et des factures d’achat vont donc inévitablement devoir évoluer.