Crise Covid-19 et adaptation des plans de rémunération variable des forces de ventes : quelles actions ?

 

Les règles du jeu avant 2020

La rémunération variable des commerciaux repose sur l’hypothèse que cette population peut influencer le résultat des ventes et améliorer les performances financières et commerciales (vente, marge…). Certaines entreprises ont d’ailleurs opté pour un package de rémunération des forces de vente très à risque afin d’inciter fortement à la performance. C’est-à-dire proposant un salaire de base plus faible que les pratiques généralement observées sur le marché et une rémunération variable offrant des opportunités de gain élevées. Opportunités de gain, dont le mode de calcul reposait généralement sur l’évaluation d’indicateurs fiables, mesurables et pertinents.

Le contexte COVID-19

Malheureusement lorsqu’un événement exceptionnel, tel que la crise COVID-19, ralentit soudainement les ventes, ce type de rétribution est mis à mal. En effet, indépendamment des efforts des commerciaux, la performance économique n’est plus au rendez-vous et la rémunération des équipes de force de vente s’en trouve alors fortement amputée.
Amputée, le terme n’est pas trop fort : les populations commerciales se voient généralement attribuer des rémunérations variables représentant de 20 à 30% de leur salaire, voire jusqu’à 50%. Lors d’une enquête conduite par le cabinet Willis Towers Watson auprès de 134 entreprises européennes, il est ressorti que 70% de ces entreprises estiment que la crise COVID-19 impactera négativement leurs résultats sur les 2 prochaines années. En parallèle, 53% de ces entreprises ont réduit leur enveloppe de bonus 2020.
La crise COVID-19 oblige donc à revoir la politique de package avec une part significative de variable.

Quelles nouvelles règles du jeu ?

Face à ce contexte incertain et en changement rapide, comment adapter sa politique de rémunération ? Comment fixer les règles du jeu d’une rémunération variable qui ne repose plus sur des critères pertinents ? Comment gérer les différentes populations commerciales ?
Comment donner du sens à ces actions ?
Le cabinet Willis Towers Watson a pu conseiller et accompagner ses clients dans ces réflexions. La plupart se sont dirigés vers un ajustement des mécanismes ou vers un maintien d’un montant de la rémunération variable.
Pour la bonne mise en œuvre de ces actions, il n’y a pas de réponses toute faites, qui s’appliqueraient à tous. Il faut pour cela s’interroger sur les paramètres de la conception des plans de rémunération variable qui doivent être redéfinis. Voici quelques exemples de questions à se poser :

1 – Eligibilité

Si l’entreprise souhaite maintenir un montant fixe de bonus, il convient de s’interroger sur la population de commerciaux éligible à cette action de maintien du package de rémunération : quels critères retenir pour déterminer l’éligibilité ? Un critère exprimé en termes de seuil du salaire de base ou un plafond de rémunération totale (cible ou réelle) ? Un critère lié à l’activité ? Un critère lié au niveau de séniorité ? Ou encore en fonction de l’impact subit par cette crise ?

2 – Montant

Dans quelle mesure maintenir le package de rémunération ? Comment définir ce montant garanti ? Sera-t-il exprimé en montant fixe (principe d’égalité) ? En pourcentage du salaire de base ou en pourcentage de la rémunération variable cible (principe d’équité) ? En fonction des résultats passés ? Dans ce cas, quelle(s) période(s) de référence prendre en compte ? S’agit-t-il d’une somme garantie ou d’une somme récupérable (soit une avance sur les futurs versements)

3 – Mécanismes

En parallèle des actions de maintien d’un niveau de bonus, certaines entreprises ont choisi de revoir les modalités de calculs des rémunérations variables à verser :
– Baisse des seuils de déclenchement,
– Révision des pondérations (généralement, augmentation de la pondération des critères collectifs),
– Ajout/suppression d’indicateurs (via notamment l’ajout de critères qualitatifs),
– Baisse des objectifs fixés en début d’année,
– Complément de bonus versé sous forme de prime exceptionnelle.
Ces modalités et leur durée doivent être clairement définis au sein d’un process de gouvernance formalisé.

4 – Gouvernance

La gouvernance des ajustements réalisés et les conditions de leurs éventuelles reconductions doivent elles aussi être clairement définies afin que l’entreprise « garde la main » sur d’éventuels ajustements futurs similaires. Le dispositif est-il renouvelable ? Quels facteurs permettent de déterminer la fin de leur mise en œuvre ?

Les recommandations du cabinet Willis Towers Watson

En complément des bonnes questions à se poser, deux grandes recommandations : communiquer et adapter selon votre stratégie. En effet, il est essentiel de communiquer de façon transparente auprès des équipes. N’ajoutons pas de l’incertitude à l’incertitude ambiante. Que des mesures soient prises ou non, il est essentiel d’en communiquer clairement les raisons et objectifs aux équipes concernées.
De plus, ne cherchez pas à reprendre des mesures mises en place chez votre concurrent ou au sein d’une entreprise qui semble comparable à la vôtre. Ce qui fonctionne ailleurs ne fonctionnera pas forcément chez vous. Inspirez-vous des bonnes pratiques, mais ne les recopiez pas. Ce qui vous ressemble, ce qui est en ligne avec la stratégie de votre entreprise et avec votre culture, vous assurera un meilleur retour sur investissement et une meilleure implication des équipes.
Sylvie Girbal, Directrice - Rewards Consulting & Gender Pay - Willis Towers Watson: Sylvie GIRBAL a intégré l’activité Talent & Rewards de Willis Towers Watson en 2018 comme Directrice de l’Offre Rewards Consulting. Elle bénéficie d’une expérience en Rémunération et Avantages sociaux de plus de 15 ans dans différents secteurs : Conseil, Immobilier, Grande distribution, Distribution sélective, Audiovisuel, rôles exercés tant sur des missions d’expert « Comp&Ben » que sur des rôles plus larges incluant la paie, le contrôle de gestion sociale ou le SIRH.