Nos sociétés et les entreprises évoluent quasiment en permanence sous l’impulsion de l’innovation, ce qui implique que les compétences numériques peuvent devenir rapidement obsolètes. Si la formation continue est une condition préalable dans la plupart des métiers, elle l’est d’autant plus lorsque les nouvelles technologies entrent en jeu. Tandis que l’art d’apprendre son métier et de l’exercer dans les règles restent une constante, en ce qui concerne les compétences en matière de données, la capacité d’adaptation est le maître-mot.
L’heure est venue d’apprendre à désapprendre
Cependant, si nous revisitons la notion d’engagement au changement, on remarque que ce dernier n’est pas une voie à sens unique. Le développement de compétences professionnelles, a fortiori dans un univers en mutation aussi rapide que celui des données, n’implique pas d’en accumuler de nouvelles indéfiniment afin de disposer de plus large éventail possible. Il est tout aussi important de désapprendre les compétences devenues superflues.
S’il peut sembler contre-intuitif de se priver volontairement de certaines compétences, personne ne possède la capacité d’en acquérir indéfiniment tout en conservant un niveau élevé de performance. De plus, ces nouvelles compétences peuvent parfois entrer en conflit avec – voire contredire totalement – les anciennes. En période de stress, en particulier si les nouvelles compétences ne sont pas encore pleinement maîtrisées, le risque consistant à se rabattre sur les méthodes de travail précédentes, qui sont dépassées mais bien plus familières, est réel.
Le désapprentissage est au cœur de la data literacy
Dans un cadre professionnel, la data literacy (soit la capacité à lire, comprendre, analyser et travailler avec les données) est l’un des principaux domaines où les compétences doivent être apprises et désapprises rapidement. Là encore, cela peut paraître contre-intuitif. Après tout, les données sont essentiellement constituées de faits et de chiffres, et nous devons apprendre à nous servir de nouveaux outils afin de mieux accéder à ces données et les analyser. Une fois parvenus à un certain niveau de data literacy, nous nous estimons mieux armés pour comprendre et utiliser efficacement les données.
Cependant même pour les experts les plus chevronnés, ce n’est pas aussi simple. De nouvelles sources de données sont créées et intégrées dans les entreprises en permanence, s’accompagnant souvent de leurs propres schémas et comportements qu’il est nécessaire de s’approprier. Les sources existantes évoluent également, présentant de nouvelles tendances ou perdant totalement leur importance. Où intervient le désapprentissage ? Si nous attribuons le même statut aux nouvelles sources ou si nous ne remarquons pas ce qu’elles nous révèlent, car elles ne sont pas conformes à ce que nous avons pris l’habitude d’attendre, ceux qui les observent passeront alors à côté de nouvelles opportunités et menaces.
La data literacy est un processus constant d’apprentissage et de désapprentissage, consistant à écarter les idées reçues tout en continuant d’appliquer notre expérience et nos connaissances pour parfaitement comprendre ce que nous disent les données.
Comment apprendre à désapprendre en trois étapes
1 – Savoir identifier le moment pour désapprendre
Il faut prendre conscience du moment où une chose apprise n’est plus valable. Parfois cela va de soi, par exemple en cas de changement concret d’une règle. Mais en général, c’est plus compliqué, car bon nombre de compétences ou d’habitude sont devenues inconscientes. En qui concerne la data literacy, cela implique de mettre en place un processus signalant quand quelque chose ne fonctionne plus.
2 – Apprendre indépendamment
Si la nécessité d’un changement a été identifiée, il faut commencer par acquérir la nouvelle compétence. Il convient toutefois de le faire indépendamment de l’approche déjà en place. L’acquisition d’une nouvelle compétence est un processus délicat, car d’une part, les capacités en place ne doivent pas empiéter sur les nouvelles, mais d’autre part les méthodes dépassées et actualisées d’observation des données ne doivent pas être utilisées simultanément. Cette condition est indispensable pour désapprendre la compétence obsolète.
3 – Rompre avec une habitude pour en adopter une autre
Pour maîtriser véritablement une compétence, il s’agit d’en faire une seconde nature de façon à pouvoir la mettre en œuvre inconsciemment, y compris sous pression. Cependant si des membres expérimentés de l’équipe, accoutumés à procéder d’une certaine manière exercent une influence sur les autres, cela peut ralentir le processus d’acquisition. En effet, leurs collègues moins chevronnés risquent de prendre leur exemple pour une meilleure pratique, même si la direction tente d’installer une solution plus productive. Il convient donc de leur laisser le temps d’adopter de nouvelles habitudes sans être influencés par les plus anciens parfois réfractaires au changement.
Dans leur propre intérêt, toutes les entreprises ont besoin de collaborateurs bénéficiant des compétences nécessaires pour s’épanouir dans leur travail. La data literacy est un socle fondamental sur lequel prendre appui. Toutefois, même les capacités les plus pointues doivent être actualisées à un moment ou à un autre. Être devenu un expert dans un domaine particulier ne dédouane pas d’une mise à jour, surtout lorsque le domaine en question évolue également. C’est pourquoi, si le développement des compétences professionnelles fait partie des objectifs des collaborateurs, ils doivent se poser la question de savoir quelles oublier avant d’en acquérir de nouvelles et se remettre ainsi en question pour éviter de retomber dans de vieilles habitudes.