Polytechnicienne, ingénieur des ponts et chaussées, après un cursus brillant elle entame une carrière de haute fonctionnaire et s’investit aux côtés du Président de la République dans le pilotage périlleux de réussir à réformer le pays sur des thématique telles que les retraites, les conditions de travail, la transition énergétique, le logement, l’hôpital, la formation… Focus sur une techno, discrète, secrète et pugnace.
De pupille de la Nation à Polytechnique
Née en 1961, Elisabeth Borne grandit à Paris où ses parents dirigent un laboratoire pharmaceutique dans le 15e arrondissement. Sa mère, Marguerite Lescène, tenait auparavant une pharmacie tout comme son propre père Marcel Lescène, ancien pharmacien et maire de la ville de Livarot (Calvados).
Le père d’Elisabeth Borne, Joseph Bornstein, de religion juive et d’origine russe, ancien apatride, résistant durant la Seconde Guerre mondiale et déporté dans les camps d’Auschwitz et de Buchenwald, adopte à l’issue de la guerre le nom de « Borne » qui figurait sur ses faux papiers, et obtient la nationalité française.
Au suicide de son père, Elisabeth Borne à 11 ans devient pupille de la Nation et obtient une bourse d’études. Après une scolarité brillante, elle entre en classes préparatoires puis intègre Polytechnique (promotion 81), obtient le diplôme d’ingénieur de l’École nationale des ponts et chaussées puis un MBA au Collège des ingénieurs. Elisabeth Borne sera promue ingénieur en chef en 1998 puis au grade d’ingénieur général en 2007.
De haute fonctionnaire à Première ministre
Elisabeth Borne entre ainsi dans l’élite technocratique et démarre une carrière de haute fonctionnaire dans l’administration d’État en rejoignant en 1987 le ministère de l’Équipement de Pierre Méhaignerie. Elle sera tour à tour
– conseillère au ministère de l’Éducation nationale de Lionel Jospin et de Jack Lang,
– conseillère technique charge des transports au cabinet de Lionel Jospin.
– directrice stratégique de la SNCF en 2002
– directrice des concessions chez Eiffage (2007)
– directrice générale de l’urbanisme à la mairie de Paris
– préfète de la région Poitou-Charentes et Préfète de la Vienne (2023)
– Présidente-directrice générale de la RATP(2015-2017)
– Ministre de la Transition écologique et solidaire (2019-2020)
– Ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion
– Première ministre chargée de la Planification écologique et énergétique succédant à Jean Castex, élue députée du Calvados la même année.
« Un serpent froid qui ne lâche pas sa proie » pour « 100 jours d’apaisement et d’actions »
C’est une combattive, une grosse bosseuse, exigeante et rude à la tâche. Son histoire personnelle – elle dédie sa nomination comme Première ministre à « toutes les petites filles » – explique en grande partie sa personnalité faite de pugnacité. Grande travailleuse, elle tient bon, ne lâche rien tout en maîtrisant son émotivité ce qui lui vaut le qualificatif de reptilien « un serpent froid qui ne lâche pas sa proie », elle s’investit à fond dans ses missions, sans relâche ni répit, exige un travail précis, rapide et parfait de ses collaborateurs, ce qui lui vaut le surnom de « Borne out ».
C’est une fidèle et une loyale à une ligne politique et à ceux qui la représentent, elle marche dans le sillage de Lionel Jospin, Ségolène Royal et aujourd’hui d’Emmanuel Macron. En 2017, ministre des Transports sous le gouvernement Philippe, elle s’engage dans un plan national destiné à développer le vélo comme moyen alternatif de déplacement dans les villes. En 2018, elle conduit la réforme de la SNCF visant à ouvrir le transport ferroviaire à la concurrence. A l’origine de l’écotaxe ajoutée sur tous les billets d’avion au départ des aéroports français, cette initiative lui vaut la réputation de ne pas être suffisamment impliquée dans l’écologie. En 2022, succédant à Jean Castex, avec la mission de conduire la réforme des retraites en 2023 elle fait face au plus grand défit de sa carrière.
Technocrate expérimentée, habituée à la façon de travailler du Président de la République, elle impressionne par son éthique dans le travail. Pur produit de la méritocratie française, ses qualités de négociatrice redoutable lui valent des critiques qui lui reprochent d’exiger sans état d’âme le maximum de ses collaborateurs.
Sous la carapace de la technocrate sévère se cacherait les qualités d’un « animal politique » malgré une certaine distance avec le grand public. On lui reconnait la trempe des grands dirigeants adaptés aux missions impossibles, comme celle de la réforme des retraites.
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