La récente élimination du Paris Saint-Germain en huitième de finale de la Ligue des champions de football suscite beaucoup de réactions mais, par-delà les émotions exprimées dans la presse et sur les réseaux sociaux, cet événement donne surtout des leçons à celles et ceux qui s’intéressent à la façon dont une stratégie se prépare et se met en œuvre.
Leçon n°1 : une équipe n’est pas seulement une somme d’individualités
Selon une étude que la FIFA a rendue publique l’été dernier, le PSG a été le quatrième club le plus dépensier dans le monde entre 2011 et 2020, derrière Manchester City, Chelsea et le FC Barcelone. Le journal allemand Bild a même chiffré à près d’1,4 milliard d’euros le cumul des coûts assumés par le club parisien pour se faire transférer des joueurs. Une telle somme invite évidemment à s’inquiéter du retour sur investissement, et ce d’autant plus que le PSG n’a remporté aucune compétition européenne depuis 1996.
Force est de constater qu’à l’exemple de Jesé Rodriguez Ruiz, Javier Pastore, David Beckham, Hatem Ben Arfa et Gianluigi Buffon, certains joueurs n’ont été quasiment d’aucune utilité dans les différents schémas tactiques mis en place et dans les résultats obtenus. Ces échecs ne sont cependant que des épiphénomènes car, plus fondamentalement, le PSG souffre du caractère trop opportuniste et insuffisamment réfléchie de la gestion de ses ressources humaines. Avec des joueurs comme Angel Di Maria, Neymar, Kylian Mbappé, Lionel Messi et Sergio Ramos, l’effectif actuel ressemble plus à une accumulation de noms prestigieux qu’à un groupe d’hommes consentant à des efforts communs en vue d’atteindre des objectifs clairement définis. Compte tenu de cette situation, il n’est guère étonnant que, dans son édition du 21 décembre 2021, le journal L’Équipe ait rendu compte de « moments de tension et de discorde » au sein de l’effectif jusqu’à rebaptiser le club « Paris Secrets et Grincements ».
Leçon n°2 : les objectifs ne deviennent atteignables que si tout le monde s’implique
Les approximations dans les recrutements ont des conséquences désastreuses sur les contenus des matchs. Commentateurs et supporters s’accordent pour constater que, quel que soit l’adversaire, certains joueurs ne se donnent guère la peine d’aider leurs coéquipiers lorsque cela s’avère nécessaire. Les plus critiqués sont les joueurs offensifs, qui font rarement les efforts indispensables pour aider leurs coéquipiers défenseurs bien qu’ils fassent partie des rémunérations les plus élevées.
Dans une équipe de football comme dans toute autre organisation, les objectifs ne sont atteignables que si tous les protagonistes s’impliquent quand survient une difficulté qui n’était pas prévue. Dans la majorité des entreprises, près de 50 % des processus ne se déroulent pas normalement. Les raisons sont très diverses mais, ce qui importe, c’est que les collaborateurs s’entraident et se coordonnent pour résoudre les problèmes et faire en sorte que la situation revienne à la normale le plus vite possible. Tel n’est pas le cas, sur le terrain, d’une partie des joueurs du PSG. Sans une évolution de l’état d’esprit et des comportements, le club parisien restera incapable de rivaliser avec les plus grandes équipes européennes.
Leçon n°3 : si le manager est voué à servir de « fusible », l’équipe ne peut pas progresser
Depuis son rachat par Qatar Sports Investments, le PSG a connu six entraîneurs : Antoine Kombouaré, Carlo Ancelotti, Laurent Blanc, Unai Emery, Thomas Tuchel et Mauricio Pochettino. Cela signifie qu’en moyenne, chacun de ces entraîneurs est resté en poste moins de deux ans. Une longévité aussi faible dans une fonction aussi importante révèle un grave manque de bon sens. Pour faire exister une équipe et, a fortiori, pour faire monter le niveau de compétence, un manager a besoin de temps. L’instabilité que les dirigeants du PSG ont provoquée a des effets pervers préoccupants : elle fait fuir les coachs les plus réputés et elle déresponsabilise les joueurs, qui savent pertinemment qu’en cas de contre-performances répétées, l’entraîneur sert de « fusible ».
Là encore, le manque de discernement des dirigeants laisse songeur car d’autres clubs montrent que, pour rendre une équipe redoutablement performante, il n’y a pas de meilleure méthode que de laisser un entraîneur travailler dans la durée. Le club de Manchester United a connu les plus belles pages de son histoire avec Alex Ferguson, qui a entraîné l’équipe de 1986 à 2013. De même, Arsenal a su faire confiance à Arsène Wenger de 1996 à 2018. Au PSG, aucun changement d’entraîneur n’a permis d’améliorer significativement les résultats jusqu’à présent.
Leçon n°4 : il est impossible de rivaliser avec la concurrence sans une stratégie de rétention des talents
Souvent peu inspirés dans leurs choix de transfert, les dirigeants du PSG semblent carrément incompétents en ce que concerne la rétention des talents. Nicolas Anelka, Kingsley Coman, Christopher Nkunku, Jean-Kévin Augustin : la liste des jeunes joueurs à potentiel que le club a laissé partir après les avoir pourtant préparés à une carrière professionnelle est loin d’être exhaustive. A cela s’ajoute que le club ne retient pas non plus des joueurs qu’il a recrutés au milieu de leurs carrières et qui ont démontré de grandes capacités. A l’instar de Lucas Moura, d’Edinson Cavani et de Thiago Silva, bien des joueurs ont passé plusieurs saisons au PSG avant de se voir refusé des prolongations de contrat. S’ils restent capables de jouer au plus haut niveau, ce sont d’autres clubs qui profitent maintenant de leurs talents.
En la matière, il n’est même pas nécessaire d’aller chercher des références à l’étranger : dans le championnat de France, l’Olympique lyonnais donne l’exemple d’un grand professionnalisme. Le club dirigé par Jean-Michel Aulas est connu pour disposer d’un des meilleurs centres de formation du monde. Parmi beaucoup d’autres, des joueurs comme Karim Benzema, Nabil Fekir, Samuel Umtiti, Alexandre Lacazette, Houssem Aouar et Maxence Caqueret ont été formés à Lyon. En comparaison, le dispositif de formation du PSG paraît dramatiquement sous-performant.
Leçon finale : sans un véritable esprit d’équipe, sans confiance dans le management et sans stratégie de rétention des talents, il ne sert à rien de continuer à dépenser toujours plus d’argent et à vouloir « rêver plus grand ».