L’hospitalité, chaînon manquant de l’espace de travail

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Si des pratiques telles que le télétravail, le desk-sharing ou encore le flex-office étaient déjà une réalité pour de nombreuses entreprises – poussées par de jeunes actifs qui, ayant grandi avec l’internet et la technologie mobile exigeaient déjà une certaine flexibilité -, force est de constater qu’elles ont été largement démocratisées par la crise sanitaire de 2020, soulevant au passage un débat sur l’utilité des espaces de travail traditionnels. Et si l’hospitalité était la clé pour envisager des modalités de travail plus souples et plus humaines ?

Un an et demi plus tard… une rentrée loin d’être uniforme

Les managers ont réalisé qu’il était tout à fait possible de superviser avec succès les employés travaillant à domicile, à condition de faire preuve de souplesse, de communiquer fréquemment et d’accorder une attention particulière aux circonstances individuelles et à la façon dont ils mesurent la productivité. Alors, ce constat sonne-t-il le glas du bureau ?
Non, lorsque la poussière commencera à retomber, beaucoup diront que le bureau leur manque. La présence sur un lieu de travail présente un avantage de taille, elle permet le contact. D’interactions informelles, au détour d’une pause-café, se nouent les relations et se renforce la culture d’entreprise. La crise aura alors aidé à comprendre les vraies raisons d’aller au travail : la collaboration et une véritable appréciation de nos collègues.

Faudrait-il donc préparer le retour massif au bureau traditionnel ? Non, choisir de revenir à la situation antérieure, c’est comme choisir de ne pas passer au numérique il y a 20 ans. C’est une option, mais qui conduira une entreprise à la médiocrité et la condamnera à rattraper son retard dans le futur.

Les employés sont les premiers décisionnaires

Ce qui manque dans le débat, c’est le fait que ce n’est pas vraiment aux entreprises de choisir. Ce sont les employés qui, en fin de compte, prendront la décision.
Les entreprises qui tentent de forcer un retour au bureau perdront la guerre des talents. Les meilleurs employés ont aujourd’hui plus d’options que jamais, et de plus en plus, ils refusent de collaborer avec des entreprises qui les obligent à se raser, s’habiller, sauter dans un métro bondé, et s’asseoir à un bureau cinq jours par semaine avec leurs écouteurs en essayant d’éviter les distractions. Ils renouvellent leurs attentes en matière d’expérience d’utilisation et de modalité de travail et il est impératif pour les entreprises de les écouter, de les considérer comme des clients à satisfaire et de les convaincre de venir grâce à un excellent produit : l’espace de travail réinventé.  Un espace qui incarne les transformations profondes de la société, facilite les tâches que les employés ne peuvent pas faire chez eux et cultive le lien, en bref, en véritable hub social.

La communauté et la responsabilité sociale des entreprises

Cette nouvelle restructuration de l’espace de travail implique de prendre moins d’espace au profit de plus de flexibilité, tout en mettant l’accent sur les espaces permettant aux employés de partager des repas, d’avoir des conversations spontanées et de participer à des programmes liés au travail. En bref, des bureaux plus petits, mais des lieux de travail plus agréables et plus généreux.
Pour ce faire, les entreprises devront faire appel à des prestataires dont l’hospitalité est le cœur de métier. Des opérateurs qui inventent des lieux où l’on peut travailler, mais où la vie ne se résume pas uniquement à cela ; des lieux où l’on partage, on lit, on mange, on boit, on réfléchit, on développe des idées, on discute, on collabore, on s’informe, on rencontre d’autres personnes, on s’amuse, on s’inspire… In fine, des lieux aux possibilités enrichies et réinventées.

Ces experts, qui pourraient incarner un nouveau statut de “Chief Hospitality Officer”, savent aider les entreprises à construire des espaces flexibles, infusés de technologie (salles de brainstorming, des studios d’enregistrement de podcasts et de vidéos, des salles de projection, des outils de fabrication…), qui offrent des services que les entreprises ne proposent habituellement pas (programme de bien-être, service de restauration et bar, programmation culturelle et événementielle…).

Prendre moins d’espace à des conditions plus flexibles afin de s’adapter et d’évoluer en fonction des besoins des employés, là réside la clé de la pérennité et de l’attractivité des entreprises. Et si les pratiques bienveillantes que certaines entreprises instaurent – qui reconnaissent leurs travailleurs comme des humains à part entière avec des vies complexes – se maintiennent, nous retrouverons des lieux de travail plus généreux et une amélioration de la qualité de vie spectaculaire.

Philippe Bourguignon, co-fondateur du Shack: Il a passé toute sa carrière dans l’Hôtellerie (CEO de Disney, Accor, Club Med, Miraval) et est depuis quelques années au côté de Steve Case (fondateur d’AOL) dans le fonds Revolution aux US. Il a également codirigé le Forum Davos pendant quelques années. Il cofonde Le Shack en 2020, un concept unique à la croisée de l’espace de travail, de restauration et de bien-être, situé dans le quartier de l’Opéra dans les anciennes et illustres imprimeries Calmann-Lévy.