Les crises sanitaires et géopolitiques engendrent une recrudescence des PSE. Contrairement aux idées reçues, se concentrer sur les collaborateurs qui quittent l’entreprise ne suffit pas. La rapidité du rebond dépend aussi de la capacité à prendre soin de ceux qui restent.
Depuis le début de la crise sanitaire, le nombre de plans de sauvegarde de l’emploi (PSE) est en forte hausse. En 2022, la fin progressive des aides de l’Etat devrait, inévitablement, engendrer de nouvelles opérations de restructuration voire des défaillances d’entreprises. Dans ce contexte, de plus en plus d’organisations mobilisent des moyens pour renouer au plus vite avec la performance économique après une restructuration.
Maintenir l’emploi d’un collaborateur ne suffit pas à garantir son engagement au travail
Or, la rapidité du rebond est très liée à l’attention portée aux « survivants » des restructurations. Ces personnes semblent « épargnées » car elles sont toujours en poste mais cela ne suffit ni à maintenir leur confiance dans l’entreprise, ni leur engagement au travail.
Victimes conscientes ou inconscientes du « syndrome du survivant », elles ont vécu
« aussi » un traumatisme parfois profond et durable, avec des conséquences pour leur organisation qui peuvent être lourdes : recrudescence de l’absentéisme, perte de productivité, dégradation de la qualité de service…
« Limiter les effets de ce “stress des survivants“ est un défi pour les dirigeants, DRH, et partenaires sociaux déclarent Florence Caviglioli et Myriam Bué, Directrices régionales chez Latitude RH, cabinet expert de l’accompagnement des transformations et de la mobilité collective. « Accompagner son plan de restructuration par un volet rebond RH prépare l’ensemble du corps social à être résilient et confiant en l’avenir. »
La remise en dynamique positive du corps social doit se faire en parallèle des suppressions de poste
Les entreprises qui ont vécu plusieurs restructurations ou PSE comprennent l’intérêt économique de prendre soin des survivants.
Le DRH d’un équipementier automobile qui a fait le choix d’un plan de remobilisation de ses équipes parallèlement à la conduite de son PSE en témoigne « Le programme que nous avons mené avait plusieurs objectifs : restaurer la confiance dans le projet de redéploiement de l’entreprise, sécuriser l’encadrement de proximité pour l’aider à « remobiliser ses troupes » et assurer le soutien social des salariés les plus fragilisés. Nous nous sommes concentrés sur l’empowerment des équipes, la transformation en profondeur du rôle de manager et le développement des aptitudes nécessaires au fonctionnement d’une organisation agile où chacun contribue directement et consciemment au projet d’entreprise. Cela a aidé chacun à trouver sa place dans l’organisation « post crise » en ayant une prise sur la « nouvelle réalité ».
André Calisti, Managing Director de Mutares France – fonds d’investissement spécialisé dans l’acquisition de sociétés en situation de retournement – affirme : « Il nous arrive d’avoir à gérer la frustration des personnes qui restent. Ces dernières peuvent se retrouver avec une charge de travail plus conséquente qu’avant et se comparent avec ceux de leurs collègues qui, directement concernés par le PSE, ont bénéficié d’indemnités de départ. Paradoxalement, cela nous amène à leur expliquer pourquoi elles ne sont pas parties.
Ensuite, il est essentiel de les interroger sur leurs attentes et leurs craintes sans préempter leurs réponses. Les solutions doivent être simples et pragmatiques pour que tout le monde puisse les comprendre et les intégrer, en commençant par le management. Il peut s’agir de clarifier la stratégie de l’entreprise et leur rôle dans son déploiement, de mettre en place des formations pour adapter les compétences individuelles et collectives ou encore proposer aux salariés des mesures qui leur permettent d’améliorer leur pouvoir d’achat.»
La vraie difficulté pour une entreprise qui se restructure est de réussir à gérer en même temps l’urgence qui est de réussir la réorganisation et la démarche de remobilisation de ceux qui restent qui s’inscrit, elle, dans le moyen terme.
Proposer un projet porteur de sens pour l’avenir et prendre soin d’accompagner également ceux qui restent deviennent ainsi des étapes essentielles des projets de réduction d’effectifs.