Le danger est que la technique remplace toute forme d’échange, que l’outil soit assez complexe de sorte que seul le prestataire comprenne de quoi il retourne. De fait, le client en devient tributaire pour le comprendre, et le prestataire, expert de l’outil, voit sa posture de coach compromise. Solutions d’une spécialiste pour profiter au mieux de ces outils en développement personnel.
Ce qui est dit dans l’outil n’est pas parole d’évangile
Les résultats de l’outil peuvent figer un cadre dans une vision qu’il a de lui-même. Le danger est d’autant plus grand qu’il est naturel de figer ce qui est dit et de se l’approprier (« se coller des étiquettes »). Par exemple, « Je suis bleu ». Mais mon cher Schtroumpf, il faudrait être « rouge » pour amener le changement dans l’entreprise. Super, donc à moins de mettre un nez rouge, je suis recalé(e) ?
Pour le prestataire, le danger, c’est le syndrome du magicien d’Oz, tout finit toujours par ressembler à un clou quand on est un marteau. Dans l’histoire, le magicien d’Oz propose de mettre des lunettes vertes aux amis de Dorothée pour les protéger du rayonnement de la cité d’émeraude. C’est supercherie : les lunettes vertes permettent de voir la cité en vert émeraude alors qu’elle ne l’est pas.
Le prestataire formé à un outil commence par tout voir au travers de son outil. Les lunettes permettent de modéliser la réalité, de la découper et la classer, elles modèlent le regard. Une nouvelle perception s’ouvre, que c’est plaisant cette impression de maîtriser d’un coup! De plus, je peux communiquer à l’autre sur cette perception nouvelle, l’autre partage également le sentiment de la découverte! Toutefois, la réalité reste la réalité: un tout global. Découper revient à lui apposer un point de vue. La cité d’émeraude n’est pas d’émeraude sans les lunettes vertes…
Lecture recommandée Pour réussir, mieux vaut construire un plan de développement de carrière
Le prestataire doit prendre du recul par rapport à l’outil
A quoi sert cet outil, et dans quel contexte est-il pertinent ? Quelles sont ces limites ? Prendre du recul par rapport à l’outil est très difficile. Ces lunettes collent aux yeux. Même retirées, elles restent dans votre esprit. L’intention d’origine de ces outils est d’éduquer à la perception à partir d’une réalité simplifiée, découpée. Le piège alors est de confondre l’objectif – apprendre à mieux percevoir – et le moyen – l’outil et la vision découpée -. Ces lunettes, même super pratiques, ne remplaceront jamais les yeux. Le magicien d’Oz de l’histoire, lui, ne met pas les lunettes, il sait qu’elles déforment le réel. Pour le prestataire, rester libre par rapport à son outil est un vrai challenge.
Les outils de développement personnel sont somme ceux de l’artisan, selon la littérature du management et développement personnel. Dans l’artisanat, l’outil permet de développer une technique. Cette technique fait progressivement évoluer la vision que l’artisan a de son art. Dans le développement personnel, cette technique influe directement sur l’ESPRIT ! Ici, l’outil modifie la perception de la réalité: il est même conçu dans cette optique. Le prestataire perçoit au travers de son outil et peut tout simplement oublier ses lunettes sur son nez…
Il lui est demandé un travail formidable de maturité, de nuance, de feed-back et de subtilité/habileté dans la communication pour pouvoir jouer avec ses lunettes et rester libre.
Lecture connexe Les outils psy : un piege à c…?
Coller une étiquette
Le prestataire peut vouloir parfois, consciemment ou non, tellement que le cadre entre dans son modèle qu’il va lier ce que ce cadre dit et fait avec son outil. C’est la “prophétie auto-réalisatrice”. Par exemple, “cher cadre, vous avez mis du vert aujourd’hui: vous avez des problèmes avec votre maman (comme 99% des gens d’ailleurs). Notre outil en déduit que vous êtes violet dans notre système. Violet ou violé ?
Choisir objectif et prestataire puis l’outil
Rappelons alors l’intention de l’outil. Poser l’intention permet le choix du bon outil, une communication claire du cadre d’utilisation (et donc les limites). Moyen n’est pas résultat. Cette intention n’exclut pas des bénéfices secondaires à l’utilisation. Par exemple, je prends un outil pour créer des synergies dans mes équipes et certains conflits interpersonnels sont résolus. Aussi, un « bon » prestataire avec un mauvais outil peut réaliser de belles choses pour votre entreprise mais l’inverse n’est pas vrai. Si je plante délicatement un clou avec une vieille chaussure ou avec un marteau, il sera planté. Si je plante un clou en tapant dessus comme un fou, avec un marteau ou une chaussure, à la limite la chaussure fera moins de dégâts…
Parmi les prestataires, certains sont uniquement des techniciens d’un outil, d’autres posent avec vous l’intention d’aller vers vos résultats. L’outil ne va pas non plus résoudre votre problème de choix de prestataire. La maîtrise d’outil peut être un critère parmi d’autres. L’astuce pour choisir un prestataire est de trouver un mode sélectif qui intègre le quoi – vers où la prestation nous emmène – et le comment – comment on y va ? -, en priorisant sur le résultat.
Lecture recommandée Secrets pour choisir votre prestataire de développement personnel
Le cadre, le cadre et encore le cadre
Cadrez : communiquez clairement et sincèrement sur l’outil. Dire : “l’outil ne sert pas à juger/évaluer les personnes” si c’est vrai…. Si vous voulez générer de la confiance autour de l’outil et du changement, mieux vaut dire la vérité, mais pas forcément toute la vérité. Communiquez également sur l’intention, la portée et la limite de l’utilisation de l’outil. Doubler l’outil d’une mise en pratique si possible ou de l’observation du terrain. La pratique valide une cohérence ou une incohérence entre la perception que le cadre ou ses pairs ont de celui-ci et la perception de ses actes. En cas d’incohérence, n’oubliez pas que la vérité est plus complexe qu’il n’y paraît et que l’intention est de mettre les gens en mouvement !
Au niveau de votre organisation, avant de choisir l’outil, vous devez vous interroger sur sa maturité à le recevoir.
Quels sont les enjeux de pouvoirs qui vont soutenir l’outil, et comment sera-t-il perçu ? L’interrogation est la même pour la conduite du changement : quels sont les risques et les points de résistance ? L’outil lui même est intrinsèquement facteur de résistance : il “juge”. Malgré d’immenses précautions oratoires, tout le monde se colle naturellement des étiquettes. Si un test vous dit : “vous aimez le rôle type « rouge »”, il est possible que vous entendiez : “vous « êtes quelqu’un de rouge »” et que vous demandiez à votre voisin de table s’il est « bleu » lui. Le prestataire doit cadrer inlassablement la compréhension et les attentes. La perception proposée par l’outil est simplement un point de départ. Il permet de travailler le feedback dans le groupe et d’orienter les managers/ participants vers l’action. En synthèse, tout simplement, l’outil est très utile s’il est utilisé tout simplement comme un outil. Un marteau peut planter un clou, casser une vis ou faire mal aux doigts…