Ex-DRH de Sanofi, d’Elf Aquitaine, de PSA, et de la BPCE, aujourd’hui jeune retraité et auteur du livre « Itinéraire d’un DRH gâté » (voir notre article DRH heureux ou DRH dépressif ?), Jean-Luc Vergne inaugure cette nouvelle rubrique intitulée « Interview express ». Son objet : faire réagir des personnalités sur l’actualité de la semaine écoulée dans un format court. Au menu de cette semaine : les séquestrations de dirigeants, la place du DRH dans le dialogue social et la réforme de la formation professionnelle.

1) Plusieurs séquestrations de dirigeants et/ou responsables RH viennent d’avoir lieu (Goodyear Amiens, République du centre), quelles leçons en tirer ?
Tout d’abord, je voudrais tordre le coup à une idée reçue : il y a moins de séquestrations actuellement qu’il y a 20 ans (2 ou 3 par an contre une par mois dans les années 70-80) et les opérations de restructuration des entreprises sont beaucoup moins violentes. La séquestration est perçue par les salariés mécontents et à bout comme l’ultime recours : on répond à la violence par la violence car il n’y a pas de vrai dialogue social. Il faut impérativement réinstaurer ce dialogue social au sein des entreprises.

2) Quelle est la place du DRH dans ce dialogue social ?
Les DRH doivent faire preuve de discernement et de courage comme je le dis dans mon livre. Il faut savoir dire non au patron et oui aux syndicats dans certains cas. Et non pas systématiquement oui à son patron et toujours non aux syndicats.  Le DRH doit prendre des initiatives, initier de nouveaux thèmes de dialogue social. Si j étais en poste aujourd’hui, j’initierai des échanges sur la stratégie, la compétitivité de l’entreprise, la redistribution des profits, la retraite supplémentaire, le management du travail, le numérique… Si les entreprises ne veulent plus se plaindre de l’intrusion du juge et du législateur dans les relations du travail, elles doivent régler les problèmes par le dialogue social. Les syndicats sont moins actifs qu’avant. Dans deux affaires récentes où des cadres de grands groupes ont été mis au pilori (4 cadres supérieurs de Renault condamnés à tort en direct à la télévision par le PDG Carlos Ghosn et la PDG d’Areva Anne Lauvergeon espionnée par des cadres de son entreprise), on n’a pas beaucoup entendu la voix des syndicats s’élever pour les défendre.

3) La réforme de la formation professionnelle qui doit être adoptée par le Parlement d’ici la fin du mois est-elle une bonne chose ?
Ma réponse sera mitigée. Il y a tout d’abord deux éléments positifs dans ce projet de loi : on est passé par la démocratie sociale avant la loi (les partenaires sociaux connaissent bien les besoins des entreprises et des salariés), et les demandeurs d’emploi ont été intégrés au dispositif de formation professionnelle, ce qui n’était pas le cas auparavant. Je mettrais toutefois plusieurs bémols. Le Compte personnel de formation (CPF), qui succèdera au DIF en 2015, augmente peu le nombre d’heures de formation (150h sur 9 ans au lieu de 120h sur 6 ans). De plus, le texte ne prévoit rien sur la certification des organismes de formation : n’importe qui peut aujourd’hui s’installer comme formateur, ce qui n’est pas le cas par exemple pour les coiffeurs !

Itinéraire d’un DRH gâté




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Sophie Lhameen
Sophie Lhameen, journaliste multimédia (web et print), a travaillé pendant 15 ans comme journaliste spécialisée sur l'Afrique avant de devenir en 2008, rédactrice en chef adjointe du magazine Le MOCI (Moniteur du commerce international) jusqu'en janvier 2013. Ses centres d'intérêt : l'entreprise, le management, les ressources humaines, l'emploi, l'économie, l'intelligence économique et de l'international. Google+