Aujourd’hui, certaines entreprises en viennent à supprimer les entretiens annuels, devenant pour elles un moment de tension trop difficile à gérer. Or, il existe pourtant un vrai cercle vertueux entre entretiens annuels et feedbacks réguliers. Explications par Pierre Monclos, Expert en Digital Learning et Directeur des Ressources Humaines chez Unow.

Feedback positif ou correctif, feedforward, sandwich feedback…

on observe autour de ce moment d’échanges privilégiés qu’est le feedback autant de fantasmes que de contre-vérités, souvent véhiculés par une littérature florissante sur la toile. Au cœur des pratiques RH modernes, les feedbacks réguliers ne sont pourtant que peu mis en place au sein des entreprises, qui attendent encore pour beaucoup le sacro-saint entretien annuel. Période de cristallisation des émotions, le passage de l’entretien devient ainsi, pour les collaborateurs comme les managers, une source d’angoisse. Pourtant, préparé et accompagné d’échanges constructifs tout au long de l’année, il s’agit là d’un réel outil d’apaisement et de motivation dès lors qu’il est construit en accord avec la culture de l’entreprise. Alors comment impulser durablement une culture du feedback au sein de son organisation ? La réponse à travers 4 conseils clés.

Donnez une définition précise et partagée de la structure du feedback

Il est essentiel pour chaque entreprise, selon sa culture, d’ériger sa propre vision et définition du feedback. Si pour être efficace certains ingrédients clés – tels que le fait d’être préparé et réfléchi en amont ou le fait qu’il intègre des éléments factuels – sont universels, d’autres aspects du feedback découlent de choix propres à l’organisation.
Posture directe ou indirecte, expression ou non du ressenti de la personne donnant le feedback, signe de bienveillance ou proposition d’un levier d’aide immédiatement actionnable… autant d’éléments sur lesquels statuer pour permettre à l’ensemble des membres d’une entreprise, quel que soit leur niveau hiérarchique, de partager une définition commune et précise du feedback. Autre point important : l’usage de l’écrit ou de l’oral. S’il s’agit là encore d’un choix propre à l’entreprise, l’oral reste à privilégier pour éviter une mauvaise perception dans la tonalité du message, et ainsi ne pas risquer certaines mécompréhensions et frustrations.

Identifiez l’objectif stratégique selon la culture de l’entreprise

Pour un changement de culture durable, le sujet du feedback doit être positionné comme un levier stratégique. Facteur clé de succès, les objectifs inhérents à la mise en place de feedbacks réguliers peuvent être divers : apprendre à partager des éléments d’amélioration pour faire progresser les compétences des collaborateurs, ou encore augmenter la reconnaissance en interne. Cet objectif central, quel qu’il soit, se doit d’être en accord avec les valeurs de l’entreprise, d’autant plus si cette dernière les a formalisées. La généralisation du feedback nécessite ensuite, comme pour tout grand projet RH, une exemplarité de la direction et du management sur le sujet ainsi qu’une bonne communication interne via la mise à disposition de ressources ou l’organisation de formations et d’ateliers pratiques. Généralement portée par la Direction des Ressources Humaines, la pratique du feedback doit rapidement être incarnée par les managers.
Pour que toute l’organisation suive cette nouvelle mouvance, il peut ainsi être intéressant de prévoir – dès le début du processus – un moment d’échanges durant lequel la direction présentera sa vision du feedback, les objectifs recherchés et les délais d’application.

Adoptez une juste posture du feedback sans négliger l’aspect émotionnel

Un feedback est un exercice de communication à part entière. Il faut donc être en capacité de le recevoir ou de le mener, sans biais ou débordement émotionnel. Ainsi, afin d’installer un climat propice à l’échange, il est essentiel de se mettre dans un état d’esprit d’ouverture et d’écoute. Ces bases de la communication non violente permettront aux différentes parties de ne pas se braquer, mais aussi de ne pas réagir « à chaud ». Un exercice qui peut néanmoins paraître difficile lorsque le feedback est négatif. Dans ce cas précis, il est important de revenir vers la personne ayant reçu ce feedback après un court délai afin de s’assurer qu’elle n’ait pas pris les remarques formulées comme une attaque personnelle et ainsi désamorcer rapidement certaines frustrations au besoin. Par ailleurs, notamment si le feedback est long, une retranscription par écrit des éléments évoqués oralement permet d’éviter toute potentielle erreur d’interprétation. A l’inverse, la personne ayant reçu ce feedback se doit de prendre le temps d’une réflexion personnelle, et ce en partant du postulat que les retours qui lui ont été faits sont totalement bienveillants, afin d’identifier les éléments susceptibles de le faire progresser.
En outre, le feedback sandwich – visant à « glisser » un retour négatif entre deux compliments – n’est pas une bonne posture à adopter en ce qu’il nuit à la progression en brouillant le message initial.

Créez une cohérence entre feedbacks réguliers et entretiens annuels

Aujourd’hui, certaines entreprises en viennent à supprimer les entretiens annuels, devenant pour elles un moment de tension trop difficile à gérer. Or, il existe pourtant un vrai cercle vertueux entre entretiens annuels et feedbacks réguliers. Si l’entretien annuel est un rite qu’il ne faut ni banaliser ni éradiquer au profit des feedbacks, ces derniers allègent la charge émotionnelle des entretiens et permet ainsi d’y aborder les sujets liés à la trajectoire professionnelle du collaborateur.
La pratique régulière du feedback – en ce qu’elle permet de désamorcer rapidement certains blocages et d’aborder en continu des sujets clés – entraîne ainsi une augmentation de la performance et de l’engagement des collaborateurs et fait diminuer leur niveau de stress via une prise de recul plus importante sur leurs actions. Se tenant après une série de feedbacks ayant eu lieu tout au long de l’année, l’entretien se transforme en une sorte de revue de performance, beaucoup plus constructive et davantage centrée sur l’année à venir que sur celle qui vient de s’écouler. Les externalités positives d’un feedback régulier rayonnent ainsi auprès de toutes les parties prenantes de l’entreprise !