Comment faire pour que la volonté d’une souveraineté technologique en Europe se transforme réellement en actes ?

Alors qu’il est bien vu aujourd’hui de défendre la souveraineté technologique, personne ne passe réellement à l’action et ne se tourne vers des solutions européennes, seules garantes d’une souveraineté double, à la fois sur les technologies et sur les données. Au contraire, nous voyons par exemple des entreprises comme Airbus ou Renault signer avec Google. Mais pourquoi le choix américain et désormais chinois semble s’imposer comme une évidence alors qu’il existe des alternatives françaises et européennes, et comment faire pour réduire la dépendance des entreprises françaises aux GAFAM ?
En France, les grands acteurs capables de proposer des services numériques sont Capgemini, Altran, Atos, Sopra-Steria pour citer les plus connus. Ils absorbent à eux seuls presque 90 % des marchés publics, mais ne savent vendre que trois produits : Google, AWS (Amazon Web Services) et Microsoft. Aucun d’entre eux n’ose promouvoir une solution française, souvent portée à bout de bras par deux entrepreneurs, et qui ne grandiront qu’avec la confiance du premier marché français. Depuis l’abandon du numérique français en mars 2000 suite à l’explosion de la bulle Internet (dot-com bubble), aucun acteur politique et aucun entrepreneur du CAC 40 n’a démarché les 300 start-up, PME ou ETI pour trouver la solution à leur problème. Nous faisons plus confiance en la technologie américaine quand il s’agit de gérer nos propres données qu’en l’innovation européenne, quand il s’agit de promouvoir notre économie et préserver par-delà notre libre arbitre et nos libertés.

De plus grands moyens financiers sont nécessaires pour garantir une souveraineté technologique

Seulement 3,7 milliards seront consacrés au développement des start-up et de la souveraineté technologique française dans le plan de relance du gouvernement annoncé le jeudi 3 septembre. Un montant largement insuffisant et qui n’incitera pas les entreprises à se tourner vers des solutions françaises, parfois trop cher comparées aux technologies étrangères.

Faire de la promotion des technologies françaises et européennes une priorité

Il est important de se soutenir entre entreprises européennes et de créer des initiatives comme par exemple le club des IT50+ et PlayFrance.digital, un collectif de personnalités de la tech qui appellent les entreprises françaises et européennes à investir plus de 50% de leur budget IT (logiciel, services, cloud et télécoms) auprès d’acteurs français et européens, afin de réduire leur dépendance auprès des GAFAM.
Le club des dirigeants s’engage à :
– investir plus de 50 % de tout nouveau budget IT d’investissement ou de fonctionnement auprès d’acteurs français ou européens,
– contribuer via un budget ETD – European Technology Development (à l’instar du budget RSE) à la création d’écosystèmes et de réseaux d’entreprises innovants,
– retenir dans tout appel d’offre un minimum de 50 % d’acteurs européens,
– produire des communications de références européennes et permettre aux pépites technologiques européennes de les communiquer.
Mais la promotion des acteurs du numérique européens devrait être également la priorité du gouvernement, à commencer par faire changer le code des marchés publics et évaluer systématiquement le bien-fondé du choix d’une technologie extracontinentale selon l’exemple du CFIUS (Comité pour l’investissement étranger aux États-Unis). Il devrait imposer, avec des moyens et un cadre législatif revisité, la gouvernance européenne en matière de souveraineté numérique. Commençant par cesser de reconnaitre les lois extraterritoriales américaines en premier lieu, et par porter celles européennes avec leurs valeurs comme le RSE et bien sûr le RGPD.
Une réelle prise de conscience de cette dépendance américaine/chinoise est essentielle. En parler, et sensibiliser le plus de monde possible à cette dépendance permettra de faire réagir et de faire comprendre qu’une souveraineté technologique européenne ne pourra se faire que sur des investissements technologiques locales solides tant en infrastructure qu’en logiciel. Mais surtout avec plus d’attractivité financière comme la déduction fiscale des montants investis en technologies européenne ou la révision du budget 2021 de l’Etat qui ne prévoit pas à cette heure une politique incitative puissante.
Frans Imbert-Vier, CEO d'UBCOM, Agence Conseil en stratégie de cyber sécurité - Suisse: Ancien DSI pendant plus de vingt ans, passé par Apple, OMNICOM et le groupe Marie Claire, Frans Imbert-Vier crée sa propre société de conseil en cybersécurité. CEO d'UBCOM, l'Agence Conseil en stratégie de cyber sécurité basée en Suisse, Frans Imbert-Vier apportera un éclairage ludique et disruptif sur le sujet de la cybersécurité. À 49 ans, ancien CIO du Groupe Omnicom pour TBWA, il a travaillé durant plus de 15 ans à la protection du secret des grandes marques internationales. Intervenant à l'ISEP (Institut Supérieur d'Électronique de Paris), il publie de nombreuses tribunes et fait référence dans le monde de la cybersécurité et les sujets relevant de la souveraineté politique et technique d'une donnée. Stratégiquement il choisit d'implanter son siège social en Suisse là où la protection de la donnée est inscrite dans la Constitution comme un droit inaliénable. Il ouvre ensuite un bureau à Paris puis à Luxembourg.