1 – Calculer les effectifs
Pour la mise en place du CSE, la période de référence a été modifiée puisque le seuil de 11 salariés doit être atteint de manière consécutive pendant 12 mois (et non plus pendant 12 mois consécutifs ou non au cours des 3 dernières années. Comme pour le comité d’entreprise, les salariés à durée indéterminée à temps plein sont intégralement pris en compte dans les effectifs. Les salariés en CDD et intérimaires sont pris en compte au prorata de leur temps de présence au cours des 12 derniers mois sauf s’ils remplacent un salarié absent. Les salariés à temps partiel sont pris en compte au prorata de leur durée du travail. Il convient de ne pas oublier les salariés mis à disposition par une entreprise extérieure présents dans les locaux et qui y travaillent depuis au moins un an. Ces salariés doivent non seulement être inclus dans les effectifs mais ils seront également de potentiels électeurs du CSE (et non plus éligibles). D’où la nécessité d’interroger leur employeur, préalablement aux élections, sur le nombre de salariés mis à disposition ainsi que sur le choix éventuel de ceux-ci de voter dans leur entreprise d’origine. Enfin, s’agissant de l’effectif déterminant le nombre d’élus (de 1 à 35 titulaires), il s’apprécie à la date envisagée pour le premier tour de scrutin.
2 – Sécuriser préalablement le cadre de mise en place
La Cour de cassation vient de le rappeler avec force, avant d’organiser les élections du CSE, il est nécessaire de déterminer le cadre de mise en place de celui-ci et dans une entreprise dotée d’un délégué syndical (DS), cela passe nécessairement par l’ouverture d’une négociation avec les organisations syndicales représentatives (Cass. Soc. 17 avril 2019 n°18-22248). Cette négociation doit bien être distinguée de la négociation du protocole d’accord préélectoral car elle est menée uniquement avec les organisations syndicales représentatives dans l’entreprise. A défaut d’accord conclu à l’issue d’une négociation loyale, l’employeur pourra déterminer ce cadre par une décision unilatérale. Pour les entreprises qui ne sont pas dotées d’un délégué syndical, cette décision peut être prise directement sans négociation préalable. Enfin, et c’est le second enseignement de l’arrêt précité, les entreprises doivent porter une attention particulière à l’information des organisations syndicales sur la décision unilatérale portant sur le cadre de mise en place du CSE. Cette information concerne non seulement les organisations syndicales représentatives mais également les organisations syndicales ayant constitué une section syndicale dans l’entreprise et elle doit être distincte de l’invitation à la négociation du protocole préélectoral.
3 – Convoquer les Organisations Syndicales à la négociation du PAP
Ce n’est pas une nouveauté, l’employeur doit inviter les organisations syndicales (OS) à la négociation du protocole d’accord préélectoral. L’invitation doit leur parvenir 15 jours avant la date de la première réunion et être effectuée au moins deux mois avant l’expiration des mandats. Les OS non représentatives[1] sont convoquées par tous moyen, en pratique par un affichage. L’employeur doit se conformer à cette obligation même s’il n’a pas connaissance de l’existence d’une quelconque section syndicale dans l’entreprise. L’employeur doit en outre informer par courrier trois « type » d’organisations syndicales :
– les OS reconnues représentatives dans l’entreprise, dans ce cas, l’entreprise convoque l’OS par l’intermédiaire du délégué syndical.
– les OS ayant constitué une section syndicale : l’entreprise convoque l’OS par l’intermédiaire du représentant de la section syndicale (RSS).
– les syndicats affiliés à une organisation syndicale représentative au niveau national interprofessionnel,
Dans la majorité des entreprises qui n’ont ni RSS ni DS, il s’agira de la seule invitation par courrier à effectuer. Il s’agit des 5 grandes confédérations : CFDT, CFTC, CGT, CGT-FO et CFE-CGC. La Cour de cassation considère que l’invitation est valablement adressée au siège national de celles-ci sans obligation d’inviter l’union locale dont relève l’entreprise (Cass. Soc. 15 novembre 2017 16-60268).
La nouveauté principale issue des règles du CSE consiste à exonérer les entreprises entre 11 et 20 salariés de l’obligation d’inviter ces organisations syndicales lorsqu’aucun salarié ne s’est porté candidat aux élections dans un délai de 30 jours qui suit l’information du personne sur l’organisation des élections
4 – Conclure ou non un protocole préélectoral
Le protocole préélectoral a d’abord pour objet de répartir le personnel entre les catégories composant les collèges électoraux et les sièges entre les collèges. Il doit, représentation équilibrée oblige, mentionner la proportion d’hommes et de femmes de chaque collège. A défaut d’accord, qui pour être valable sur ces sujets, doit être conclu à la double majorité[2], l’employeur devra saisir l’Administration qui prendra une décision de répartition. Un nouveau sujet de négociation existe pour le CSE : le nombre de sièges ou le volume des heures de délégation peuvent être modifiés, dès lors que le volume d’heures global d’heures de délégation tel qu’il résulte du décret est maintenu. Un protocole préélectoral peut donc diminuer le nombre d’élus dès lors que le volume total d’heures de délégation est constant. Enfin, le protocole porte également sur les modalités d’organisation du scrutin. En la matière, à défaut d’accord avec les organisations syndicales, l’employeur peut prendre une décision unilatérale qui fixera ces modalités.
5 – Mettre en place le vote électronique
Le vote électronique semble être, pour l’entreprise, le gage d’un scrutin plus simple à organiser et dont les résultats seront plus difficilement contestables. Depuis 2016, le recours au vote électronique est désormais possible sur décision unilatérale de l’employeur et non plus uniquement par accord collectif d’entreprise. Pour les entreprises dotées d’un délégué syndical, l’entreprise devra néanmoins engager des négociations au préalable. Le code du travail impose le respect d’un certain nombre de caractéristiques techniques au système de vote électronique mais également la mise en place d’une cellule d’assistance technique et l’organisation d’une formation du bureau de vote et des élus.
Le respect de ces règles ne pose pas vraiment de difficultés aux différents prestataires qui proposent ces systèmes de vote. Mais la Cour de cassation veille à ce qu’en pratique, le vote électronique s’accompagne de garanties suffisantes en matière d’authentification de l’électeur.
Ainsi l’envoi des codes d’authentification aux électeurs par email n’est possible que si la messagerie électronique de l’entreprise est suffisamment sécurisée (Cass. Soc. 21 septembre 2016 n° 15-60216). La Cour est encore plus stricte lorsque des électeurs ont volontairement donné leurs codes à un autre salarié qui a voté à leur place : cela entraîne automatiquement l’annulation de l’élection, même si le nombre de vote frauduleux n’a pas eu d’incidence sur le scrutin (Cass. Soc. 3 octobre 2018 n°17-29022). En l’absence de solution technique satisfaisante permettant d’éviter ces usurpations d’identité, les entreprises ont intérêt à rappeler les sanctions pénales encourues par les salariés en cas de vote pour autrui.
6 – Respecter les règles de représentation équilibrée homme femmes
L’objectif poursuivi est louable, la mise en œuvre pratique est ardue. Depuis 2017, les listes de candidats doivent présenter un nombre d’hommes et de femmes correspondant à la part d’hommes et de femmes inscrits sur la liste électorale. Les listes doivent comporter alternativement un candidat de chaque sexe jusqu’à épuisement des candidats d’un des sexes. Ces règles s’appliquent aux deux tours de scrutin.
Exemple simple : le collège est composé à 60 % d’hommes et 40 % de femmes et 10 sièges sont à pourvoir. Les listes devront être composées de 6 hommes et 4 femmes selon deux ordres possibles : F/H/F/H/F/H/F/H/H/H/H/H/H/H ou H/F/H/F/H/F/H/F/H/H/H/H/H/H.
Pour la Cour de cassation, l’objectif de représentation équilibré conduit à exclure la validité des candidatures uniques qui pourraient permettre au syndicat de détourner l’application de la règle (Cass. Soc. 9 mai 2018 n°17-14088). Les listes incomplètes d’au moins deux candidats semblent rester valables pourvu qu’elles respectent la proportion d’hommes et de femmes du collège (Cass. Soc. 17 avril 2019 n° 17-26724). En cas de non-respect des règles de représentation équilibrée, l’élection de l’élu du sexe surreprésenté est annulée, ce qui pourra conduire à l’organisation d’élections partielles.
7 – Dépouiller et proclamer les résultats
Le scrutin n’a pas changé de nature : il s’agit d’un scrutin de liste, avec représentation proportionnelle à la plus forte moyenne. Les listes obtiennent donc d’abord autant de sièges que le nombre de voix recueillies divisé par le quotient électoral puis les sièges restant sont attribués à la plus forte moyenne. Cette attribution des sièges et l’établissement des procès-verbaux est une opération souvent délicate. De plus, la Cour de cassation veille très strictement aux conditions d’établissement du procès-verbal : il doit être établi par un membre du bureau de vote (Cass. Soc. 2 juillet 2014 n° 13-60268), signés par les membres du bureau immédiatement après la fin du dépouillement et la proclamation des résultats doit être faite après cette signature (Cass. Soc. 7 décembre 2016 15-26096). L’employeur peut donc, sans se départir de son obligation de neutralité, avoir intérêt à apporter son aide en donnant une information aux membres du bureau de vote sur le respect de ces règles. Mais ce n’est que 15 jours après la proclamation des résultats, date d’expiration du délai de contestation des opérations électorales, qu’il pourra définitivement tourner la page des élections…pour quatre ans.
[1] Pour être précis, les organisations syndicales qui satisfont aux critères de respect des valeurs républicaines et d’indépendance, légalement constituées depuis au moins 2 ans et dont le champ professionnel et géographique couvre l’entreprise ou l’établissement concernés.
[2] Majorité des organisations syndicales représentatives et majorité des organisations ayant participé à la négociation.