Notre actualité brulante bouscule nos rapports et notre regard à notre environnement. Dernièrement, un dirigeant d’une entreprise importante me confiait que sa génération « n’était pas acculturée au changement climatique ». Pourtant, l’écologie est fondamentale car elle est la science qui étudie les interactions entre les êtres vivants mais aussi avec leur milieu.
Cet ensemble des êtres vivants, de leur milieu de vie et des relations qu’ils entretiennent forme un écosystème. L’un de ces écosystèmes est celui que nous fréquentons tous : le monde du travail, et plus spécifiquement le monde de l’entreprise. Le travail qui est un effort perpétuel pour modifier notre environnement, est la source de réflexion des plus grands philosophes à commencer par Hegel, pour qui l’Homme travaille afin d’inscrire son empreinte dans ce qui l’entoure donc ce fameux environnement. De ce rapport inédit entre l’être humain et son labeur découle l’ensemble des grands progrès techniques à la fois positifs mais aussi négatifs avec son lot de pollution, de réchauffement climatique et de modification des espaces naturels. Nous vivons encore sur cet esprit hérité à la fois des révolutions industrielles puis des Trente glorieuses d’un progrès sans fin. Bref, pour citer Voltaire que par le travail nous pouvons éloigner de nous « l’ennuie, l’envie et le besoin », ce qui est fondamentalement vrai et positif pour le développement de notre société.
Changer nos mentalités et acceptant nos limites
Cependant, les aléas climatiques, dont les plus récents (les incendies ravageurs de l’été notamment), rappellent durement les limites terrestres. Une ère nouvelle s’ouvre, celle que le président Emmanuel Macron nomme « la fin de l’abondance ». Notre époque ne pourrait plus permettre « des liquidités sans coût ». La raréfaction des produits, de l’énergie, mais aussi de l’eau sera l’avenir des Français et des entreprises. Ce changement de paradigme est encore plus visible dans la déclaration de la première ministre, devant les rangées du MEDEF, le mouvement patronal, le 29 août dernier. Elle explique que dans le cadre de la transition énergétique, « nous avons besoin d’une évolution radicale. Mais radical ne veut pas dire violent, subi, ni décroissant ». Ainsi dès aujourd’hui, il faudra préférer « les économies choisies aux coupures subies. »
Prévoir et former à un monde plus sobre et plus écologique
Cet état de fait oblige à la sobriété et interroge la distinction entre nos désirs et nos besoins, et plus largement encore sur les limites collectives que nous pouvons accepter. Cette « fin de l’abondance » qui serait pour le Président « la fin de l’insouciance » peut être une chance. Une chance, si nous sommes capables d’ « anticiper» pour faire référence à la dernière tribune du Maire de Neuilly-sur-Seine, Jean-Christophe Fromantin, dans la Harvard Business Review.
Cette anticipation passe donc par la formation à l’écologie alors qu’il est demandé à chaque entreprise de préparer un plan de sobriété d’ici fin septembre. L’objectif visé, à savoir une baisse de 10 % de la consommation d’énergie sur deux ans est trop faible pour les enjeux annoncés. La fermeture forcée des centrales nucléaires et la guerre en Ukraine présagent des coupures bien plus importantes pouvant aller jusqu’au rationnement. Il est désormais urgent d’apprendre la sobriété. C’est donc par un apprentissage des réflexes écologiques des cadres et managers (et des futurs managers) des entreprises et administrations de l’Etat, qu’une prise de conscience sincère sera effective. Le souhait de mettre en place dans chaque entreprise un référent sobriété semble être une bonne nouvelle à condition de lui donner des missions précises en complément du travail des directions RSE souvent déjà bien insérées.
Une réussite écologique par l’exemple des managers
Ce travail de formation doit partir du haut, de nos dirigeants. Déjà, Les ministres, ont commencé cet apprentissage écologique. Le 31 août dernier, ils ont pu se sensibiliser aux enjeux climatiques par une membre du GIEC, lors d’un séminaire prévu à l’Elysée. Lors de cet échange, après un exposé des enjeux et risques environnementaux, les ministres devront se relayer pour présenter les actions envisagées par leur propre ministère dans le cadre de cet effort collectif.
Le management environnemental doit maintenant être de rigueur partout. Les dirigeants de société doivent faire évoluer leurs structures pour s’adapter au monde demain. Avec des managers formés, qui doivent rendre des comptes annuels sur l’impact environnemental de leur travail, la France pourra rentrer définitivement dans ce monde plus sobre et plus résilient.
Les managers doivent pouvoir recevoir un accompagnement pour cette transition : il s’agit de préparer ce passage qui peut être périlleux. L’Etat doit donc prendre attache avec les responsables des organisations patronales afin de mettre en œuvre cette aide par la mise en relation d’experts certifiés sur le climat, qui fondent leur travail sur des arguments scientifiques hors des idéologies, mais aussi de fournir un suivi continu.
Avoir des managers formés à l’écologie, c’est la certitude de pouvoir compter demain sur des dirigeants mettant en place des écobilans annuels de l’activité de l’entreprise. Avoir des managers formés à l’écologie, c’est développer en amont une éco-conception des produits, les managers trouvant des alternatives aux composants les plus nocifs. Une formation à l’écologie, c’est aussi prévenir la pollution avec l’installation de filtres pour améliorer la qualité de l’air ou de l’eau. Les managers prendront conscience également de la nécessaire diminution de la consommation d’énergie et de la réduction des déchets, là ou parfois règne encore une certaine gabegie et de vieux réflexes.
Intégrer l’écologie à la formation de nos dirigeants, c’est montrer l’exemple aux plus jeunes membres de l’entreprise, c’est apprendre à servir le bien commun. Fondé sur la responsabilité et la pédagogie, cette écologie d’entreprise est le gage d’un cercle vertueux pour notre société.