Ne confondez pas poste de travail et PC personnel. Des règles encadrent l’usage du PC professionnel. Entre le droit de contrôle et de surveillance de l’employeur sur l’activité des cadres et leurs droits et libertés de salariés, (protection de la vie privée, la liberté d’expression) difficile de savoir ce qui est légal ou pas. L’appréciation des tribunaux s’effectue souvent au cas par cas. Quelques arrêtés instaurent un cadre légal à l’utilisation d’Internet au travail.
Pouvez-vous envoyer des mails persos depuis votre boite pro ?
Selon la Cnil, l’utilisation de la messagerie électronique professionnelle dans des proportions raisonnables pour un message à caractère personnel correspond à un usage généralement et socialement admis, explique Myriam Laguillon, avocate spécialiste du droit du travail. Vous y avez droit mais avec modération. Attention, une salariée licenciée pour avoir envoyé 156 mails personnels en 2 mois invoque devant les prud’hommes l’atteinte à sa vie privée. Le Conseil des prud’hommes a jugé que “la fréquence et l’importance en volume de telles communications” préjudiciables au travail de la salariée et “le licenciement pour motif personnel à caractère disciplinaire pleinement justifié”.
Votre employeur peut-il lire vos mails ?
Tout salarié a le droit au respect de l’intimité de sa vie privée. Votre employeur ne doit pas intervenir dans votre boîte mail, il a cependant le droit d’y accéder en cas d’urgence professionnelle. Qu’il y ait ou non une charte informatique, “la jurisprudence estime le secret des correspondances primordial”. Le droit à la vie privée s’applique même sur le lieu de travail. Pour la Cour de cassation “le salarié a droit, même au temps et au lieu de travail, au respect de l’intimité de sa vie privée qui implique le secret des correspondances.” Si vous incluez la mention “personnel” dans l’objet de vos mails, il ne peut en aucun cas les lire en votre absence”.
Avez-vous un temps maximum de surf perso ?
Si l’usage à titre personnel d’Internet est toléré, il y a abus si celui-ci nuit à l’entreprise ou à la productivité du cadre. A vous d’apprécier ce qui est raisonnable ou pas. Un salarié licencié pour avoir passé 41 heures sur Internet en 1 mois sur le poste de l’entreprise, a pris la précaution de supprimer l’historique de navigation, selon lui l’employeur ne pouvait savoir si les sites étaient extra-professionnels ou non. La Cour de cassation a considéré que “cet effacement, qui ne peut être le fruit d’une inadvertance, mais résulte nécessairement d’un acte volontaire […] constitue une preuve suffisante”. Depuis quelques années, la justice sanctionne de plus en plus ce type abus.
Certains sites sont-ils plus répréhensibles que d’autres
Comme l’usage d’Internet au bureau souffre d’un flou juridique, à chaque employeur de définir la gravité des sanctions : du simple avertissement au licenciement pour faute grave selon les durées de connexions, les antécédents du collaborateur. La nature du site visité à des fins personnelles n’intervient pas dans les décisions de justice, sauf un contenu contraire à la loi ou “des navigations de nature à entacher l’image de l’entreprise”
Mon employeur peut-il bloquer des sites Internet sur mon PC?
Des entreprises bloquent l’accès de certains sites Internet. Pour des raisons de sécurité, les banques et les entreprises de secteurs “sensibles” sont les plus restrictives en la matière, bloquant techniquement l’accès aux réseaux sociaux ou sites de partage de vidéos. Des entreprises de moindre taille deviennent plus interventionnistes, ce qui est tout à fait légitime si cela est consigné dans la charte informatique ou le règlement intérieur. Idéalement, la direction doit expliciter les raisons de cette décision à l’ensemble des salariés.
Puis-je stocker des fichiers personnels sur mon PC pro?
Un arrêt de la Cour de cassation du 18 octobre 2006 stipule que les documents sur papier et les fichiers informatiques du salarié « non identifiés comme personnels » sont présumés professionnels. Dès lors, votre employeur a le droit de les ouvrir sans que vous soyez présent. Le volume du dossier personnel ne doit pas devenir excessif. Règlements intérieurs ou chartes informatiques le rappellent souvent, l’usage des PC à des fins privées doit rester exceptionnel. En théorie, un employeur n’a pas besoin de regarder les dossiers personnels dans les détails pour sanctionner s’il constate que le volume est très important.
A-t-il le droit de surveiller mon utilisation d’Internet ?
Dans un arrêt du 9 février 2010, la Cour de cassation stipule que les connexions d’un salarié pendant son temps de travail sont présumées avoir un caractère professionnel, l’employeur peut donc les suivre pour les identifier, sans la présence de l’intéressé. “En cas de connexions excessives, abusives, sans lien avec le travail ou incompatibles avec l’activité professionnelle, vous pouvez être licencié s’il apporte comme preuve l’historique des connexions considéré comme ayant été obtenu de manière licite”. L’inscription d’un site dans les favoris ne lui confère aucun caractère personnel et ne saurait donc restreindre le pouvoir d’investigation de l’employeur”.
Quelle importance revêt la charte de l’entreprise ?
La charte Internet définit les règles concernant les usages d’Internet. Ce cadre de référence est recommandé par la Cnil pour “sensibiliser les salariés aux exigences de sécurité, d’appeler leur attention sur certains comportements de nature à porter atteinte à l’intérêt collectif de l’entreprise”. En signant ce document, les salariés savent ce qu’ils peuvent faire ou non et l’employeur se prémunit contre tout excès. La charte doit être validée par le Comité d’entreprise pour être applicable
Puis-je télécharger des fichiers depuis le bureau ?
Pas de règle immuable en la matière, vous devez vous référer aux règles édictées par la charte de votre entreprise. Si vous commettez des téléchargements illicites sur Internet vous faites encourir de graves sanctions à votre employeur, qui est pénalement responsable de son personnel selon le code pénal. Si un salarié contrevient à Hadopi, la Direction générale peut avoir des soucis, ainsi que la DSI censée protéger le réseau de l’entreprise.
Puis-je tout dire sur les réseaux sociaux ?
Concernant la liberté d’expression sur Internet, deux cas. “les comptes de réseaux sociaux verrouillés et visibles de vos seuls amis et les profils complètement publics visibles de tous.” Tout ce qui est dit dans les premiers relève du privé, dans les seconds cela peut constituer un véritable dénigrement public. Vous avez le droit de critiquer votre employeur si cela ne sort pas de votre cercle proche, et il ne peut rien contre vous. En revanche une critique visible de tous sur des réseaux sociaux ou des forums, est une faute qui s’apparente à du dénigrement public. Le principe de liberté d’expression est incontestable tant qu’il ne relève pas de l’injure ou la diffamation. Revue de Presse D’après le journal d’internet et Myriam Laguillon