Le défi d’Elisabeth Borne, nommée Première Ministre ! De tous les noms qui circulaient, Mme Borne avait ma préférence. Son passage à la RATP est séduisant sur l’aspect dialogue social, son passage au ministère du travail en fait une leader naturelle sur le sujet.
Les défis d’Elisabeth Borne sont pour autant différents de ceux qu’elle a connus ces deux dernières années teintées du COVID et du « quoi qu’il en
coûte », et encore plus lors de son mandat à la tête de la RATP. Les défis d’Elisabeth Bornels demandent une nécessaire réappropriation des sujets de l’emploi, jusqu’ici cristallisés autour de la baisse du chômage, pour regarder l’impact des réformes sous un prisme sociétal. Notre société change, notre façon de traiter la question du travail doit évoluer en conséquence.

La structuration de l’emploi autour d’une société nouvelle

Les 3 nouveaux défisLe défi d’Elisabeth Borne

Le chômage de masse : le premier défi de Mme Borne sera de piloter un pays qui passe d’un chômage de masse – où l’employeur a le pouvoir – à un quasi plein emploi – où le candidat est roi. Le nouveau ministre du travail devra aider à la rencontre rapide entre employeurs et chercheurs d’emploi en accélérant le marché de l’emploi. Dans un climat qui appelle à des mesures sociales, les réformes punitives pour le demandeur d’emploi en vue de le « motiver » à trouver un travail sont à bannir. Place ici à un changement de modèle, il faut changer les processus de recherche d’emploi, quitte à retirer un peu de la place hégémonique de France Travail en ouvrant enfin les données à d’autres acteurs et employeurs ?

La recomposition des formes d’emploi est le deuxième enjeu : je prends souvent la parole sur ces sujets car l’emploi s’est massivement précarisé sous le poids d’une nécessaire flexibilité. Le CDI reste la base mais perd du terrain afin de répondre à des besoins nouveaux : autoentrepreneuriat en masse et parfois imposé (comme l’a montré le cas Deliveroo), explosion de 8% à 12% de la population active vivant d’un CDD en 25 ans, cinq fois plus de turnover des salariés en 30 ans. L’emploi se précarise malheureusement en réponse à une nécessaire flexibilité liée à nos nouveaux modes de consommation, mais également de modes de vie qui ne dirigent plus forcément vers la recherche d’un CDI.

Mme Borne et ses ministres doivent recomposer un marché de l’emploi qui a perdu en homogénéité tant du côté des besoins des employeurs que des volontés individuelles. Faire le tri entre l’emploi précaire subi et le besoin de liberté, protéger dans un monde flexible sans contraindre, accélérer le marché de l’emploi sans le précariser, autant de défis nouveaux du monde du travail de notre temps.

Le troisième défi directement lié au travail est surtout sociétal : quelle est la place du travail dans la vie de nos concitoyens ? La tendance est à un recul de la forme sacrificielle de la vie professionnelle : les Français voient de plus en plus leur carrière comme un moyen plutôt que comme une fin, et ne sont plus prêts à mettre de côté leur bonheur immédiat dans l’attente d’un hypothétique avancement.

C’est un véritable changement de logiciel pour notre classe politique : la finalité n’est plus dans les chiffres macroéconomiques du chômage, de la dette, des importations, mais dans les moyens d’accomplissements qu’ils offrent aux Français. Les enjeux sociétaux autour de la carrière sont alors une priorité : congés parentaux, pauses dans les carrières, reconversion, assurances chômages et maladies selon les statuts, capacité à entreprendre sans risque, sont autant de sujets périphériques touchant de nombreux ministères.

Le défi d’Elisabeth Borne : remodeler le travail

Mme la Première Ministre, votre gouvernement a un défi de taille : remodeler le travail autour d’une société juste tout en veillant à l’accomplissement de chacun, juste mais pas restrictive, qui aide les employeurs tout en respectant les individus. C’est un véritable projet sociétal que vous devez défendre, l’opportunité de faire de la France un pays où il fait bon travailler !